Un peu d’histoire locale pour ne pas oublier. Tome I

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Famine

Comment on peut passer d’une période de prospérité à une période de grande misère en moins de dix ans !

Grande famine de 1315-1322 et quelques horreurs !

Le contexte climatique.

Pendant la période médiévale prospère (la période avant 1250) la population de l’Europe avait éclaté, atteignant des niveaux qui n’ont pas été égalé avant le 19ème siècle et encore certaines régions de la France sont aujourd’hui moins peuplées qu’au début du 14ème siècle.

Cependant les rapports de rendement du blé (le nombre de graines pouvant être mangées par rapport aux nombre de graines plantées) avaient chuté depuis 1280 et le prix de denrées alimentaires s’était élevé.
Le bon rapport de rendement pour la survie de la population devait être de 7/1, tandis que pendant les mauvaises années il n’était que de 2/1 – c.-à-d., pour chaque graine plantée, deux graines étaient moissonnées, une pour la semence de l’année à venir, et une pour la nourriture !!!
Cela ne signifie pas que les épis n’avaient que deux grains ! Cela signifie qu’il y avait beaucoup de grains qui ne germaient pas ou mal et beaucoup de grains produits pourrissaient sur plan avant la récolte ou au stockage.

Par comparaison l’affermage moderne a des rapports de 200/1 ou plus.

Notre province du Languedoc constitue un exemple classique de la crise agraire. Depuis plus de 150 ans, le Languedoc avait bénéficié de remise en état continue des terres, d’une constante expansion agricole et d’une croissance démographique énorme.

Au printemps de 1315, une forte pluie exceptionnelle a commencé sur toute l’Europe, succédant à un hiver rigoureux. Tout au long du printemps et de l’été il a continué à pleuvoir et la température est demeurée fraîche. Dans ces conditions le grain n’a pas pu mûrir. La paille et le foin pour les animaux ne pouvaient pas être séchés et il n’y avait aucun fourrage pour le bétail.
Le prix de la nourriture a commencé à monter et a doublé en quelques mois au début de l’été. Le prix du sel a aussi doublé, et il était difficile de l’obtenir étant la seule manière de traiter et conserver la viande que l’on ne pouvait pas sécher.

Des stocks de grain pour des urgences à long terme ont été limités aux seigneurs et aux nobles. Les gens ont commencé à ramasser les racines comestibles sauvages, herbes, et écorce dans les forêts.

Au printemps de 1316 il a continué à pleuvoir sur une population européenne privée de l’énergie et de stock alimentaire pour survivre. Tous les segments de la société des nobles aux paysans ont été affectés, surtout les paysans ce qui a représenté 95% de la population.
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Pour survivre le futur a été hypothéqué.

Les animaux de trait ont été abattus, le grain de semence mangé, des enfants abandonnés pour qu’ils se débrouillent par eux-mêmes (voyez le roman Hansel et Gretel ou l’histoire du petit Poucet).
Des personnes âgées ont volontairement refusé la nourriture dans l’espoir que la génération plus jeune survivrait, d’autres ont été privées de nourriture par leur proches. Les chroniqueurs de l’époque ont rapporté beaucoup de témoignage de cannibalisme.
Des enfants abandonnés ont été mangés par les plus affamés (naissance du mythe des ogres).

Le pic de la famine a été atteint en 1317 et a commencé à décroître. Enfin en été la survie est revenue à des modèles normaux. Mais les gens étaient très affaiblis et devenaient la proie des maladies comme pneumonie, bronchite, tuberculose, et autres, une grande partie des réserves de graines avait été mangée.

Il fallut attendre jusqu’en 1325 pour que les approvisionnements alimentaires soient revenus aux conditions relativement normales et que la population recommence à croître.

Les historiens estiment que près de 25% de la population a disparu.

Ce fut une période marquée par des niveaux extrêmes de l’activité criminelle, de la mort par maladie, d’infanticide, et de cannibalisme. Il a eu des conséquences pour l’église, l’État, la Société européenne et ce fut la préparation du terrain pour les futures calamités à venir au 14ème siècle.

Dans le demi-siècle de 1302 à 1348, les mauvaises récoltes ont eu lieu vingt fois. La population sous-alimentée était mûre pour la Grande Faucheuse, qui est apparue en 1348 sous la forme de la peste noire.
Intermittences 3

Conséquences

La famine s’appelle « la grande famine » non seulement en raison du nombre de personnes qui sont mortes, ou le vaste secteur géographique qui a été affecté, ou la durée où elle a sévi, mais également en raison des conséquences durables.

• La première conséquence a été pour Église. Aucune quantité ou qualité de prières n’a semblé efficace contre les causes de la famine. Dans une société où le recours final à tous les problèmes avait été la religion, aucune des prières n’aidait et la famine a miné l’autorité institutionnelle de l’église.

• En second lieu ce fut l’augmentation de l’activité criminelle. L’Europe médiévale au 13ème siècle avait déjà été une culture violente où le viol et le meurtre étaient des affaires communes. Avec la famine même les non-criminels recouraient à tous les moyens de s’alimenter. Après la famine, l’Europe a pris un tournant plus dur et plus violent. Ces effets se sont fait sentir à tous les niveaux de la société. Peut-être que le plus frappant a été dans la guerre, dans la manière dont on s’est conduit au 14ème siècle pendant la sanglante Guerre de 100 ans. Aux siècles précédents 12ème et 13ème siècles, les nobles mourraient plus par accidents dans les jeux de tournoi que sur le champ de la bataille.

• La troisième conséquence a été l’incapacité des gouvernements médiévaux à traiter la crise. Juste comme Dieu semblait incapable ou peu disposé à répondre à des prières, les puissances terrestres étaient également inefficaces, érodant et minant leur puissance et autorité.
• Et finalement, la grande famine a marqué clairement la fin d’une période sans précédent de croissance de population qui avait commencé autour de 1050.

• En conclusion, la grande famine aura des conséquences pour de futurs événements au 14ème siècle tel que La Peste Noire sur une population déjà affaiblie et qui serait frappée encore.

Pour en savoir plus voir : Site historique de la commune de Saint-André d’Olérargues (Gard)