Emmanuel Todd : « La France n’est plus dans l’Histoire ».

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Todd
Source : Pierrick Tillet – Le monde du Yéti

Excellente interview d’Emmanuel Todd dans l’Obs du 23 mars 2016.

Son titre en dit long sur ce que l’intéressé pense de l’état de déliquescence de notre pays : «La France n’est plus dans l’Histoire».

La preuve, dit Emmanuel Todd, c’est que même les réfugiés ne veulent plus y venir !!!

Les seuls que nous ayons sur notre territoire, à Calais, ne rêvent qu’à une seule chose : partir en Angleterre.

La France, poursuit Emmanuel Todd, vit dans l’illusion d’être « le grand pays ouvert à l’immigration » alors que depuis la guerre, c’est l’Allemagne qui joue ce rôle. Pour des raisons d’ailleurs fort intéressées : cette main d’oeuvre bon marché lui permet de faire face au vieillissement de sa population et d’écraser la concurrence pour booster ses exportations.
Mais selon Emmanuel Todd, il y a encore pire pour l’amour propre franchouillard :

« Fondamentalement, ce que fait le gouvernement français n’a plus la moindre importance, et du reste les Allemands n’en tiennent aucun compte. Être lucide, de nos jours, c’est voir que la France n’est pas un pays où se fait l’histoire. »

Ce n’est pas l’état désastreux de notre machine économique et de notre ascenseur social qui risque d’arranger la situation.

Derrière la faillite des élites, le naufrage de la classe moyenne française

En France, la faillite de l’autorité politique dans à peu près tous les domaines, explique Emmanuel Todd, est la cause principale du pourrissement de la situation sociale et de l’exacerbation d’une fureur populaire qu’on retrouve autant chez les paysans désespérés que chez les jeunes en butte à la Loi Travail ou dans les banlieues sinistrées.

Mais à côté de leurs élites en perdition, les classes moyennes portent elles aussi une lourde responsabilité dans ce naufrage collectif. Ce n’est pas en arborant des macarons “Je suis Charlie”, en stigmatisant sans nuance l’islamisme terroriste rétrograde et en se réfugiant derrière une laïcité hystérique qu’elles feront oublier leur nullité, déplore Emmanuel Todd.

« Tout le monde s’abrite derrière le paravent d’élites politiques stupides. Mais Hollande, quelque part, est une fiction. Quand on l’entend, avec sa petite voix, quand on le voit ne prendre aucune décision… Il n’existe pas, Hollande. C’est un mythe, un fantasme collectif. Et les gens se planquent derrière leur mépris d’Hollande pour ne pas se juger eux-mêmes. Cela leur permet de ne pas se dire : eh bien voilà, je suis un Français vieillissant des classes moyennes, j’ai encore quelques super privilèges économiques, j’ai pu élever tranquillement mes enfants aux frais de l’État, mais maintenant, que les jeunes se démerdent, qu’ils croupissent dans les banlieues, dans les prisons, ou, s’ils sont sages, qu’ils se défoncent dans des boulots pourris. »

Encore un peu, rigole Emmanuel Todd, et ils feront d’Alain Juppé (71 ans) « le jeune espoir de la politique française ».

Reste à espérer que l’émergence de nouvelles forces de contestation et surtout de propositions donneront finalement tort à l’analyse d’Emmanuel Todd. On constate aujourd’hui une nette précipitation des événements en ce sens, à travers le mouvement initié par les jeunes du collectif #OnVautMieuxQueCa ou par les noctambules opiniâtres de la #NuitDebout.

La caractéristique capitale de ces derniers mouvements est d’avoir abandonné l’attitude exclusivement revendicative et réformatrice de leurs aînés pour passer à une contestation radicale d’un modèle qu’ils considèrent comme définitivement pétrifié.