Après avoir pollué les Cévennes au plomb, au cadmium, étain, arsenic …etc. Bientôt le gaz de schiste !
Voir l’article : Pollution à la porte des Cévennes
En 2011, le gouvernement avait abrogé « le permis de Montélimar » de Total en vue d’explorer les ressources en gaz de schiste du sous-sol.
La justice vient d’annuler cette décision.
Ce jeudi 28 janvier, le tribunal de Cergy-Pontoise (Val-d’Oise) a rendu son verdict concernant le permis de Montélimar (Drôme) de Total pour l’exploration de gaz de schiste.
Le tribunal a décidé de suivre l’avis du rapporteur public, qui, le 8 janvier dernier, s’était appuyé sur le mémoire technique de Total. Celui-ci indiquait que la société réaliserait ses recherches sans recourir à la fracturation hydraulique et emploierait des « techniques alors disponibles ».
Une faille dans l’interdiction
Total vient de gagner contre l’Etat : le tribunal administratif annule la décision qui abrogeait le permis de recherche de Montélimar. Nouvelle preuve des failles de la loi votée en juillet 2011. Les opposants appellent déjà à manifester le 28 février à Barjac (Gard). Explications.
Durant l’hiver et le printemps 2011, une mobilisation citoyenne massive a obligé le gouvernement et le parlement, majoritairement à droite, à voter en urgence une loi d’interdiction d’utilisation de la fracturation hydraulique.
Bien que ce soit la seule technique utilisée pour explorer et exploiter le gaz et le pétrole de schiste, l’article 2 de cette loi du 13 juillet 2011 laisse entendre que des techniques alternatives existent. Tandis que l’article 3 oblige les détenteurs de permis de recherche d’hydrocarbures à dire à l’administration s’ils comptent utiliser la fracturation hydraulique.
La loi du 13 juillet 2011 encourage donc les industriels à masquer leurs véritables intentions : puisque la loi reconnaît la possible existence de techniques alternatives, un détenteur de permis a tout intérêt à dire qu’il va utiliser une technique alternative et qu’il renonce à la fracturation hydraulique. A minima pour gagner du temps. Toutes les entreprises concernées, hormis une (Schuepbach pour les permis de Nant et de Villeneuve de Berg), ont d’ailleurs fait ce choix. Le plus souvent en contradiction avec les documents qu’elles avaient remis aux autorités pour obtenir le dit permis.
Aucune alternative à la fracturation hydraulique
C’est le cas de Total pour le permis de Montélimar (4327 km2 qui s’étend du Sud de Valence à la région de Montpellier). Suite au vote de la loi, l’entreprise reconnaît vouloir utiliser les « techniques de stimulation » « qui seront disponibles », mais elle affirme qu’elle n’utilisera pas la fracturation hydraulique. Mais à ce jour, aucune autre technique de stimulation n’est disponible : Christophe de Margerie lui-même expliquait au Monde en janvier 2013 que Total abandonnait la piste alternative sur laquelle l’entreprise travaillait, tandis que les entreprises qui se vantaient d’avoir mis au point des méthodes alternatives n’ont jamais réussi à convaincre. Pire, certaines ont fait faillite et/ou ont été condamnées pour escroquerie aux Etats-Unis.
Nathalie Kosciusko Morizet a outrepassé ses compétences
A l’automne 2011, le gouvernement de François Fillon décide d’annuler les permis de Schuepbach, mais aussi le permis de Total. A juste titre pour Schuepbach : le 22 décembre 2015, son recours a été rejeté puisque l’entreprise n’avait pas exclu l’utilisation de la fracturation hydraulique.
Le tribunal administratif vient par contre « d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté́ de l’ancienne ministre de l’écologie » concernant Total. En 2011, pour étayer sa décision, la ministère avait considéré que Total n’était pas suffisamment précis sur les techniques alternatives qu’elle comptait utiliser.
C’est juste.
Mais ce motif n’est pas prévu par la loi.
Pour le tribunal, « l’autorité́ administrative a exigé́ des précisions qui n’étaient pas prévues par l’article 3 ».
« En se fondant sur un motif étranger à ceux prévus par la loi du 13 juillet 2011, les auteurs de la décision ont commis une erreur de droit » précise le tribunal et « la décision [d’annulation du permis] est entachée d’un détournement de procédure ».
En annulant le permis de Montélimar, la ministre Nathalie Kosciusko Morizet a donc outrepassé le droit : la loi ne lui donne aucune compétence pour statuer de la sincérité de l’entreprise ou de la réalité des techniques alternatives.
Une loi défaillante qui n’interdit ni l’exploration, ni l’exploitation
La décision du tribunal administratif de Cergy-Pontoise révèle au grand jour ce que les opposants aux hydrocarbures de schiste ont toujours dit : la loi du 13 juillet 2011 n’a pas interdit l’exploration ou l’exploitation d’hydrocarbures de schiste.
« La loi n’interdit que la technique de la fracturation hydraulique » comme le précise le jugement du tribunal administratif. Une faille qui a toujours été vivement critiquée par les opposants aux hydrocarbures de schiste et qui avait poussé les élus socialistes à ne pas prendre part au vote en 2011 : ils s’étaient engagés à compléter la loi dès qu’ils seraient au pouvoir.
Jusqu’à ces derniers jours, rien n’avait été proposé en ce sens, pas plus du côté socialiste, que du côté des parlementaires EELV ou du Front de gauche.
Ce n’est désormais plus le cas : Sabine Buis, députée PS de l’Ardèche, vient de déposer à l’Assemblée nationale une proposition de loi relative au dialogue environnemental qui propose dans son article 9 d’inscrire dans le code minier le principe de « l’interdiction de toute exploration et exploitation d’hydrocarbures liquides ou gazeux non conventionnels ». Et ce, « quelle que soit la technique d’extraction utilisée ».
Gaz de schiste: l’Etat fait appel d’un arrêt en faveur de Total
Paris – La ministre de l’Ecologie Ségolène Royal a décidé de faire appel d’une décision de la justice d’annuler l’abrogation d’un permis de recherches de gaz de schiste de Total dans la région de Montélimar (Drôme), a annoncé le ministère samedi.
Jeudi, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise (Val-d’Oise) a, à la demande de Total Gas Shale Europe et Total Exploration et Production France, annulé une décision de 2011 abrogeant ce permis de recherche d’hydrocarbures.
La loi sur la transition énergétique (de 2015) fixe pour objectif de réduire de 30% la consommation d’hydrocarbures d’ici 2030: la loi rend nécessaire une révision globale de la politique en matière d’exploration d’hydrocarbures pour s’inscrire durablement dans la lutte contre le changement climatique, explique le ministère samedi, en annonçant la décision de faire appel.
La ministre réaffirme par ailleurs sa détermination à faire respecter strictement l’interdiction de la fracturation hydraulique dans un objectif de protection de l’environnement et de la santé.
Dans ses préconisations, le rapporteur public du tribunal de Cergy-Pontoise avait estimé que Total pouvait reprendre ses recherches, le groupe s’étant engagé à ne pas recourir à la fracturation hydraulique.
En 2011, le permis de recherche – délivré en 2010 – avait été abrogé en raison de la loi du 13 juillet 2011 interdisant le recours à cette méthode d’exploitation.
Le tribunal administratif ne dit toutefois pas qu’il rend son permis à Total, a estimé jeudi Me Hélène Bras, l’avocate d’eurodéputés écologistes opposés à ces recherches, selon laquelle le permis a de toute façon expiré le 31 mars 2015.
Les eurodéputés Michèle Rivasi et José Bové avaient cependant demandé à l’État de faire appel, car selon eux, l’interdiction d’extraire du gaz de schiste en France est ébranlée par cet arrêt.
Chez Total on est patient
Mi-janvier, le PDG de Total Patrick Pouyanné avait pour sa part affirmé que le groupe ne passerait pas en force contre la volonté du gouvernement.
« Je n’ai pas envie de passer en force sur ce sujet-là. Si la collectivité nationale ne souhaite pas qu’on fasse d’exploration de gaz de schiste, nous ne le ferons pas, avait-il expliqué sur Europe 1. Je pense qu’il faut qu’il y ait un consensus sur un sujet pareil. »
Mais il sait qu’avec le temps, les ministres changent, les gouvernants changent, les présidents changent et qu’avec un peu d’argent bien placé et une promesse d’indépendance énergétique bien des dirigeants politiques sont prêts à le suivre.
La réforme du code minier, prévue de longue date, présente une opportunité unique d’introduire le principe consistant à geler les réserves d’hydrocarbures en raison de l’urgence climatique. Ce serait une avancée historique que de reconnaître des limites à l’exploration, l’exploitation et la combustion des énergies fossiles. Une occasion également de faire basculer des centaines de millions d’euros (en France – beaucoup plus à l’échelle mondiale) de l’industrie d’exploration et d’exploitation des énergies fossiles vers la transition.
Il est temps de changer de paradigme.
Il est urgent de sortir de l’âge des fossiles.
Cela commence par arrêter de chercher du gaz et du pétrole toujours plus profond.
Et c’est à nous tou-te-s, citoyen-ne-s sincères en matière de lutte contre les dérèglements climatiques, d’exprimer très clairement ce que nous voulons.
Ici comme ailleurs, les gaz et pétrole de schiste doivent rester dans le sol.
Rendez-vous est donné le 28 février prochain, à Barjac, pour une manifestation nationale (Lire l’appel à mobilisation)