Pour y voir plus clair vous trouverez ci-après un long article dans lequel j’ai collationné et résumé « LES VRAIES RAISONS DE LA BOUCHERIE de 14/18 »

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C’est un peu long mais c’est instructif ! Vous y verrez comment nous, la plèbe, nous sommes manipulés de tous temps par ceux qui se croient l’élite parce qu’ils ont l’argent. Tout ceci devrait être enseigné aux écoliers et pas seulement l’assassinat de Sarajevo !

Extrait de La revue Les Annales, numéro 1761, datée du 25 mars 1917.

Mars 1917 : un banquier américain révèle les véritables intérêts de la finance dans la guerre 14-18

« Je pourrais vous confier que lorsqu’un peuple est sur le point de se sentir trop riche, une guerre est nécessaire pour l’arracher à la tentation du bonheur. Mais les idées abstraites ne sont pas de mon fait. Je ne connais que les chiffres. J’ignore La Fayette. J’ignore si l’Allemagne attaqua la première. De l’histoire, je ne retiens que la statistique.
Je sais une chose, c’est que la Grande Guerre a quintuplé le chiffre de nos affaires, décuplé nos bénéfices et tout ce trafic magnifique, nous l’avons opéré avec les Alliés. Nous nous sommes enrichis en vous procurant du coton, de la laine, de la viande, de l’acier, des obus, du blé, du cuir, des souliers, des mitrailleuses, des chevaux, des automobiles, des produits chimiques.
Nos actions d’aciéries, telles que la Bethleem, ont monté en six mois de 600 %. Nos poudreries, telles que l’usine Dupont, distribuent des dividendes de 110 %. Le moindre de nos débardeurs ne travaille pas à moins d’un salaire de 35 francs par jour. C’est vous qui soldez. Tout ce qu’on pouvait vous vendre, nous vous l’avons vendu. Vous nous avez payé partie en or.
Notre stock or dépasse aujourd’hui le stock or de tous les Alliés réunis. Mais vous nous avez payé aussi avec du papier. Or, vos traites ne vaudront que ce que vaudra votre victoire. Il faut que vous soyez victorieux à tout prix pour faire face à vos engagements. Je vois plus loin encore. Il vous faudra reconstruire tout ce qui fut détruit. Cet argent que nous avons gagné sur vous, nous vous le prêterons pour relever vos villes, pour rebâtir vos fabriques, pour créer à nouveau votre existence économique.
Un beau champ s’offre là pour nos placements futurs. Mais ce champ ne sera profitable que si vous triomphez avant l’épuisement complet. Voilà pourquoi nous voulons votre victoire rapide. L’Union vous aidera. Nous sommes derrière Wilson. Les rois eux-mêmes sont nos esclaves. Nous voulons la guerre ne serait-ce que pour protéger la flotte marchande anglaise dont la moitié du capital est yankee.
Nous vous aiderons plus encore que vous ne pensez. Nous enverrons des volontaires, nous voterons le service militaire obligatoire, nous augmenterons encore notre production en obus, en canons, nous prendrons part, s’il le faut, à la lutte continentale. Tous nos citoyens marcheront. L’Union n’est-elle pas déjà une gigantesque armée civile, exercée, assouplie, soumise de longue date à la rigoureuse discipline du trust ? De cette armée, nous sommes les chefs. Vous comprenez maintenant pourquoi la guerre est inévitable ? Les luttes entre peuples ? Mais c’est le seul moyen que nous avons de régler de trop lourdes différences en banque !
La Grande Guerre ? Guerre des tarifs, la nécessité d’un traité douanier avantageux, l’espoir d’une expansion économique nouvelle ! Plus encore que le Kaiser, ce sont les banques de Berlin qui ont voulu la guerre ! ».

14-18 : sans la collaboration de la Standard Oil de la famille Rockefeller … le conflit n’aurait pas duré.

Au début de la guerre de 14 18, la Standard Oil de la famille Rockefeller vendait 100.000 barils de pétrole par jour. Pendant la guerre la Standard Oil va faire de grosses affaires, car les 2 camps en guerres savent que pour triompher il leur faudra du pétrole.

Pendant ces 4 années de guerre, la Standard Oil de la famille Rockefeller va vendre du pétrole dans les 2 camps, ce qui fait qu’à la fin de la guerre la vente de pétrole à triplée pour soutenir chacune des 2 armées en conflit.
Les prix aussi ont grimpé. Pour Rockefeller la guerre était une source de profits considérables.
Sans réapprovisionnement en pétrole, les 2 camps en guerre n’auraient pas pu prolonger un tel massacre.
Après la guerre, les pays comme la France et l’Angleterre se partage l’exploitation du pétrole dans le moyen orient.
Les banques aussi ont joué un rôle dans le financement des 2 camps en guerre. Sans les millions de dollars d’argent dette émise par les banques, la guerre de 14 – 18 n’aurait peut-être duré que quelques mois et non quelques années.

Rappelons que la FED (banque centrale américaine), fut créée en 1913 par les banques privées et qu’elle a créé des millions de dollars qu’elle a prêtés aux pays en guerre.

Raffinerie n°1 de la Standard Oil à Cleveland dans l’Ohio, 1899

Comment expliquer une guerre aussi inhumaine, aussi générale ? Plein de bonnes raisons qui n’en sont pas.

1. C’est la nature humaine ? Ben tiens !

« Le fait est que les hommes dans leur grande majorité sont prêts à considérer, du moins en certaines circonstances, que le recours aux armes est une démarche légitime. Ce peut être le désir d’enrichir sa communauté et d’exalter son amour-propre […] Ces considérations nous rappellent que la guerre est dans la nature humaine » (Robin Prior et Trevor Wilson ; Atlas des guerres ; La Première Guerre mondiale).

Je comprends qu’un professeur d’Académie militaire fasse de la guerre une essence de la nature humaine. Mais, est-ce qu’en 1914 « les hommes dans leur grande majorité » ont fait délibérément le choix de la guerre ? Soyons sérieux !

2. L’engrenage des alliances ?

Ce fait-là, souvent mise en avant dans les manuels scolaires, ne constitue pas vraiment une cause. Depuis 1880, chaque « Etat » :

 Avait choisi une alliance en fonction de ses intérêts ;
 Avait maintenu ou pas cette alliance en fonction de ses intérêts (la diplomatie anglaise est essentiellement dirigée contre la France dans les années 1890 avant de s’allier à elle !)
 A fait jouer ou pas ses alliances en 1914, en fonction de ses intérêts (l’Italie, alliée de l’Allemagne et de l’Autriche Hongrie jusqu’en 1914 n’entre pas en guerre avec eux, puis s’allie à la France et à la Grande Bretagne par intérêt).

De plus, même si ces alliances ont joué un rôle, reste à expliquer le pourquoi de celles-ci. Enfin, des personnalités, des gouvernements ont concrètement pesé en faveur de la guerre et de l’engrenage des alliances.
Ainsi, le 20 mai 1914, le chef d’état-major général allemand Moltke demande à la Wilhelmstrasse (office des Affaires étrangères) de faire des préparatifs politico-militaires en vue d’une guerre préventive contre la Russie et la France.
Ainsi, l’état-major autrichien voulait la guerre. Aussi le Royaume-Uni attendait la bonne occasion pour affaiblir l’Allemagne.
Et enfin, le président de la République française Raymond Poincaré a largement pesé en faveur de la guerre au moment décisif fin juillet ; or, il s’agit d’une grande personnalité de la droite et du capitalisme français du 20ème siècle.

3. Etait-ce un hasard malencontreux ? Ou l’histoire réécrite par les américains.

Quiconque parcourt les ouvrages spécialisés récents peut constater la vogue d’une théorie importée des Etats Unis pour qui l’histoire et même ses conflits majeurs naissent essentiellement de la conjonction accidentelle d’évènements fortuits !
L’américain A.J.P. Taylor en est l’exemple type lorsqu’il explique la Guerre de 14-18 comme l’aboutissement d’une succession de facteurs secondaires : hasards, incidents, manœuvres diplomatiques manquées, déclaration de guerre visant plus à intimider qu’à provoquer le conflit, plans de mobilisation soumis aux horaires de chemin de fer » pris pour une attaque en règle… !
Cette théorie « américaine » non causaliste, pèse parmi les historiens français des 20 dernières années, malgré son aberration :
 « Plus un évènement est lourd de conséquences, moins il est possible de le penser du point de vue de ses causes réelles » (François Furet)
 « La question des causes de la guerre de 1914 est d’une extrême complexité et, dans une large mesure, il reste une part de mystère dans la manière dont les puissances européennes se sont laissées glisser vers la catastrophe » (Stéphane Audouin et Annette Becker dans  » La Grande guerre » chez Gallimard).

4. L’attentat de Sarajevo, la bonne excuse !

Le type « d’explications » ci-dessus domine aujourd’hui dans les manuels scolaires ; aussi, l’assassinat de l’archiduc héritier d’Autriche a bon dos. Comme si un évènement somme toute mineur pouvait déclencher une guerre mondiale sans raisons plus profondes. D’ailleurs, plusieurs personnalités politiques autrichiennes avaient expliqué dès 1919 comment cet assassinat avait été un prétexte !

5. Le choix de la guerre par des régimes autocratiques confrontés aux mouvements sociaux et démocratiques. Une des causes probables.

Ce choix d’une « bonne petite guerre » pour rassembler la « nation » autour de son « sauveur » ne fait pas de doute pour de nombreuses personnalités proches du pouvoir, à Vienne et à Moscou en particulier. La Russie par exemple est secouée en juin et juillet 1914 par des grèves générales massives, y compris dans la capitale Saint Pétersbourg.

6. Comprendre le contexte socio-historique pour mieux cerner les causes de la guerre.

Quelles sont les caractéristiques principales de la période 1900-1914 ?
 phase de développement économique très rapide alors que les institutions politiques, certaines encore empreintes de vestiges du mode de production féodal, ne s’adaptent pas aussi vite.
 phase de formation de nations. Les classes sociales favorisées détournent le mécontentement des couches populaires par l’exaspération du nationalisme. Dans ce processus apparaissent les courants militaristes préfascistes en Allemagne, Italie, France, Autriche… dont l’audience est réelle dans les milieux militaires par exemple.
 expansion impérialiste des nations capitalistes fondée sur la conquête coloniale de territoires, sur un rapport de force militaire, commercial et financier permanent pour gagner marchés et matières premières.

 » De nouvelles causes de conflit surgissent à chaque instant. Il s’élève des problèmes insolubles autant qu’il passe de jours ; une solution ici fait une crise ailleurs ; on ne dénoue qu’en nouant, comme dans la ficelle embrouillée » (Alain en 1913).

7. Les besoins en profits du capitalisme financier, une cause certaine.

Les profits du capitalisme financier qui s’appuient nécessairement sur un rapport de force économico-militaire pour récupérer les intérêts de dettes généralement illégitimes. Comme le résumait un grand banquier américain le 25 mars 1917 pour la revue Les Annales « Plus encore que le Kaiser, ce sont les banques de Berlin qui ont voulu la guerre ! » Voir le début de l’article.

8. Quelques voix s’élèvent en vain.

Les dirigeants socialistes ont tous insisté sur la responsabilité des antagonismes impérialistes dans l’engrenage qui va mener au déclenchement de la guerre.

 » Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée l’orage » dit Jean Jaurès avant d’être assassiné le vendredi 31 juillet 1914 à 21 h 40 trois jours avant la mobilisation générale. Son assassin, Raoul Villain, (le bien nommé) est acquitté en 1919 !!!

« L’Europe entière suivra le tambour et seize à dix-huit millions d’hommes dans leur plus bel âge, la fleur des différentes nations, sortiront équipés des meilleurs instruments d’assassinat… Soit, vous prenez le parti d’en rire. Et bien, vous verrez le résultat : après la guerre, nous serons confrontés à une faillite massive, à la misère générale, au chômage universel et à une grande famine » (August Bebel au Reichtag, 9 novembre 1911)

9. Le choc des impérialismes

Une caractéristique du capitalisme apparaît : sa tendance à la concentration et à la mondialisation ne laisse pas de place à un équilibre des nations. La concurrence constitue leur principal rapport. Chaque pays (et son patronat) cherche à être plus puissant militairement, plus compétitif économiquement que les autres, plus apte à maîtriser les sources d’énergie et matières premières. Et aujourd’hui cela n’a pas changé.

10. Le PETROLE et le Bagdad-Bahn – Le chemin de fer Berlin-Bagdad, la raison plus plausible.

Voici un épisode assez peu connu en France.
La fin de la deuxième moitié du XIXè siècle voit deux grandes puissances européennes s’affronter en terre d’Islam, plus précisément au Proche-Orient : l’Empire britannique et le 2è Reich de Guillaume II. Cette rivalité germano-britannique est très largement ignorée en France. Et pourtant, la compréhension profonde des antagonismes entre la puissance maritime britannique et la puissance terrestre allemande est capitale à connaître car elle a déterminé la Première guerre mondiale comme nous allons le voir.

La compréhension de cette époque permet aussi de mieux saisir les enjeux de la guerre des Balkans à la fin du XXe siècle. En effet, les rivalités entre ces deux Empires s’expliquent en raison des volontés de contrôle, de production et d’acheminement d’une nouvelle énergie se substituant au charbon : LE PETROLE.

Au tournant du XIXe siècle et du XXe siècle, la puissance maritime anglaise, maîtresse d’environ un cinquième des terres émergées, a besoin de maîtriser cette nouvelle énergie afin de conserver sa suprématie. En contrepartie, le jeune Empire allemand dont l’unité politique est récente (18 janvier 1871) cherche à obtenir une « place au soleil » selon les propres termes de l’empereur Guillaume II. Cette Allemagne au développement économique vertigineux se doit de trouver de nombreux marchés capables d’absorber les excédents de l’industrie germanique. Dès 1889, une véritable révolution se produit avec la naissance de liens politiques, économiques et militaires entre le 2e Reich et l’Empire Ottoman. La visite de Guillaume II à Istanbul en 1898 renforce ces liens.

LE MONDE TURC D’ALORS EST BIEN PLUS VASTE QUE L’ACTUELLE TURQUIE.

En effet, son territoire s’étend sur toute la péninsule arabique ; c’est-à-dire un ensemble qui sera appelé à se fragmenter après la guerre de 14-18 et qui a permis la naissance de l’Irak, du Koweït ou encore de l’Arabie Saoudite. L’existence prouvée de vastes réserves de pétrole en Mésopotamie au niveau de Mossoul et de Kirkouk aiguise les appétits germano-anglais. Déjà, l’Empire britannique a réussi à mettre la main sur de nombreux gisements pétroliers en Perse (actuel Iran) grâce à l’entremise d’un espion britannique, Sidney Reilly (né Sigmund Gjorgjevic Rosenblum). Son action permit la création d’une grande compagnie pétrolière britannique : l’Anglo-Persian Oil Company.

LE BAGDAD-BAHN

Cependant, cette victoire britannique était insuffisante. En effet, du fait des liens germano-turcs, Berlin mettait la pression pour réussir la construction d’une voie ferrée immense à partir des années 1890, le Bagdad-Bahn.


Partant de Hambourg, passant par Berlin, traversant l’Empire d’Autriche-Hongrie allié du IIe Reich, cette voie ferrée était obligée pour des raisons techniques et géographiques de passer par la Serbie, alliée de la France et de la Grande-Bretagne, ennemie farouche du monde germanophone.

La Serbie constituait le talon d’Achille pour l’Empire allemand. Cette voie, véritable cordon ombilical, traversait la Bulgarie (alliée de l’Allemagne) puis zigzaguait à travers toutes les vallées du territoire ottoman pour longer ensuite le territoire du Tigre et de l’Euphrate riche en pétrole. Elle devait par la suite aboutir jusqu’au Golfe persique (actuel Koweït).
Berlin envisageait de construire une base navale qui aurait menacé mortellement la « perle de l’Empire » : les Indes britanniques. Outre le renforcement économique dans tous les domaines entre Istanbul et Berlin et la naissance d’une forme d’union douanière au profit de l’Allemagne entre tous les pays traversés par cette voie, cette dernière représentait un véritable oléoduc sur rail qui aurait, si le projet allait à son terme, assuré au IIe Reich une indépendance énergétique complète face à ses rivaux anglais, américain, français et russe.

C’est donc une lutte à mort qui s’est engagée entre les Allemands et les Anglais. L’Empire britannique jouant sa place de première puissance ne pouvait pas admettre la réussite de l’Allemagne. Le Times de Londres du 3 octobre 1899 et le Financial News du 6 octobre 1899 révèlent, comme le rapporte l’économiste William Engdahl : « les fortes vues géopolitiques des milieux dirigeants de la politique étrangère britannique vis-à-vis du projet allemand de chemin de fer vers Bagdad ».
Il ne faut donc pas s’étonner de voir Londres s’opposer avec acharnement au projet allemand, en particulier, par l’intermédiaire des guerres balkaniques au cours de la décennie précédant la guerre de 1914. Ainsi la Serbie alliée à la France et à la Grande-Bretagne représentait le talon d’Achille des ambitions allemandes car ce pays représentait le point de jonction pour établir une ligne ferroviaire complète entre, d’un côté, le bloc continental européen et, d’autre part, l’Asie occidentale à partir des rives du Bosphore. Ces guerres multiples entre la Bulgarie, la Serbie, la Roumanie etc et à combinaisons multiples freinaient et entravaient l’achèvement complet du Bagdad-Bahn.

Il n’est donc pas étonnant de lire les propos du conseiller militaire anglais, R.G.D Laffan, au service de l’armée serbe avertissant que :

« Si Berlin-Bagdad se réalisait, un énorme bloc de territoires continentaux inexpugnables par une puissance maritime et produisant toutes sortes de richesses économiques serait unifié sous l’autorité allemande (…) par cette barrière, la Russie serait coupée de la Grande-Bretagne et de la France, ses amis occidentaux (…). A cette distance, les armées allemandes et turques pourraient facilement mettre en danger nos intérêts égyptiens et, par le Golfe persique, notre Empire des Indes serait menacé. Le port d’Alexandrette et le contrôle des Dardanelles donneraient bientôt à l’Allemagne une puissance navale énorme en Méditerranée (…). Un coup d’œil à la carte du monde nous montre comment la chaîne des Etats s’étire de Berlin à Bagdad : l’Empire germanique, l’Empire austro-hongrois, la Bulgarie, la Turquie. Une seule petite bande de territoire bloque la voie et empêche les deux extrémités de la chaîne de se rejoindre : la Serbie. La Serbie est petite, mais reste rebelle entre l’Allemagne et les grands ports de Constantinople et Salonique, gardienne des portes de l’Orient […) La Serbie est véritablement la première ligne de défense de nos possessions orientales. Si elle venait à être brisée ou attirée dans le système Berlin-Bagdad, notre vaste empire mal défendu subirait rapidement le choc de la pression germanique vers l’Est ».

L’attentat de Sarajevo le prétexte pour tout le monde

L’attentat de Sarajevo, le 28 juin 1914, contre l’héritier du trône d’Autriche-Hongrie François-Ferdinand allume la guerre dans toute l’Europe. L’Allemagne y voit le prétexte pour prendre possession de la Serbie. Mais en fait, cette guerre permet à l’Angleterre de jouer son va-tout. En effet, même si la guerre épuise des forces humaines et matérielles au Nord-Est de la France et sur le front russe ; l’Angleterre ne perd pas de vue que les intérêts de sa politique passent par l’anéantissement du Bagdad-Bahn Il s’agit de détruire de fond en comble le projet allemand du contrôle de production et d’acheminement du pétrole en provenance de Mésopotamie et empêcher l’émergence d’un bloc continental économiquement unifié allant de Hambourg jusqu’aux rives du Chatt-el-arab (réunion du Tigre et de l’Euphrate et qui se jette dans le golfe Persique)

Image de la construction du Bagdad-Bahn

Le choc des nations et des nationalismes

La création des nations est un phénomène récent en 1914. Il est évidemment le produit du développement des économies nationales et de l’aspiration des peuples à la constitution d’identités politiques dans lesquelles ils puissent améliorer leur sort.

La Russie, l’Autriche Hongrie et l’Etat ottoman
Ce sont des empires multiethniques sinon multinationaux avec une classe politique dirigeante présentant encore des aspects féodaux en 1914.
L’Allemagne
Elle a mené trois guerres successives avant de créer son empire en 1871. Comme dans les trois pays ci-dessus, le poids politique de l’armée et de l’orgueilleuse noblesse est très important. L’influence de courants nationalistes préfascistes ne doit pas être négligée.
Voici par exemple une citation d’Ernst Hasse, président de la Ligue pangermaniste en 1905 :
 » L’égoïsme sain de la race nous commande de planter nos poteaux frontières dans le territoire étranger, comme nous l’avons fait à Metz, plutôt […] Ces terres coloniales de l’avenir se composent […] des vastes territoires occupés par les Polonais, les Tchèques, les Magyars, les Slovaques, les Slovènes, les Ladins, les Rhétiens, les Wallons, les Lituaniens, les Estoniens et les Finlandais. Tant que les territoires de ces petits peuples, mal faits pour créer des Etats nationaux, n’auront pas été répartis entre les grands Etats de l’Europe centrale, l’Europe ne pourra jamais avoir, n’aura jamais la paix. Cette répartition coûtera naturellement de dures guerres ».

La Serbie,
Elle est indépendante depuis 1878, a mené ensuite guerre sur guerre pour s’agrandir ; elle va jouer un rôle clef en 1914. L’étude de ce pays est intéressante car on suit très bien les objectifs de la bourgeoisie serbe, dans la constitution d’un marché spécifique, d’un Etat indépendant, d’une vision mythique et mystificatrice de « la » nation historique serbe.

Le royaume d’Italie
Il se fonde en 1861. Une vision mythique et mystificatrice de la nation italienne a-t-elle été développée comme en Serbie ? Bien sûr.
Voici par exemple un texte de Mazzini, extrait de République et royauté en Italie :
« L’indépendance, c’est à dire la destruction des obstacles intérieurs et extérieurs qui s’opposent à la constitution de la vie nationale, doit donc s’obtenir non seulement pour le peuple, mais par le peuple. La guerre par tous, la victoire pour tous […]
Créer : créer un peuple ! Il est temps, ô jeunes gens, de comprendre combien est grande, religieuse et sainte l’œuvre que Dieu vous confie. Elle ne saurait s’accomplir […] que par l’exemple vivant donné aux multitudes d’une vertu austère, par les sueurs de l’âme et les sacrifices du sang […] par l’audace de la foi, par cet enthousiasme solennel, indomptable, inaltérable qui remplit le cœur de l’homme lorsqu’il ne reconnaît pour maître que Dieu […], pour unique but l’avenir de l’Italie »
.
La France
Il s’y développe aussi le sentiment national de 1870 à 1914 sur des mythes historiques (Vercingétorix, Clovis, Jeanne d’Arc…) et des références souvent « spirituelles », xénophobes (pour la droite). Tel est le cas par exemple lors de la célèbre conférence d’Ernest Renan le 11 mars 1882 :
« La nation comme l’individu, est l’aboutissement d’un long passé d’efforts, de sacrifices et de dévouements. Le culte des ancêtres est de tous le plus légitime ; les ancêtres nous ont fait ce que nous sommes. Un passé héroïque, des grands hommes, de la gloire (j’entends de la véritable), voilà le capital social sur lequel on assied une idée nationale […] »
Entre cette conception de la nation et la conception allemande fondée sur le sang, il n’y a pas grande différence.

Pour terminer ce rapide tour d’horizon des nations et des nationalismes avant 1914, voici ce qu’écrivait l’historien suédois, très éclairé, Harold Hjarne dans le journal Svenska Dagblade le 31 décembre 1899 :
« En ces dernières heures du siècle, je voudrais méditer sur l’une des forces qui ont été à la fois les plus créatrices et les plus dissolvantes … le nationalisme… Certes, les tendances nationales ont aussi servi la culture […] Mais ces avantages pèsent moins lourds que les inconvénients qui en ont résulté et qui ont fait du nationalisme le facteur politique dominant. La haine de tout ce qui est étranger […] transforme rapidement le sentiment national en un instinct qui échappe au contrôle de la raison […] Le nationalisme, en se combinant avec d’autres forces, nous conduit irrésistiblement vers de nouvelles catastrophes. »

Antagonismes et buts de guerre des belligérants.

Le capitalisme des années 1848 à 1914 passe essentiellement par le cadre politique des nations. Celles-ci promeuvent toutes une idéologie nationale censée unifier la population autour d’une même histoire mythifiée dans laquelle les grands conquérants du pays jouent un rôle central. Ce contexte psychologique explique la façon dont les peuples ont pu « tenir » si longtemps durant une guerre aussi horrible.

Le rôle des antagonismes entre nations européennes dans le déclenchement de la guerre est évident, antagonismes économico-financiers mais aussi géopolitiques.
« Si l’orage surgit tout à coup, en juillet 1914, c’est que […] les crises s’y succèdent depuis le début du siècle, de plus en plus violentes et rapprochées : dans les Balkans, les Russes ne veulent pas laisser les Autrichiens accéder à la Méditerranée en débouchant sur Salonique. Allemands et Autrichiens ne veulent pas davantage que les Russes pèsent sur les Détroits en dépeçant l’Empire turc malade. Les Anglais voient d’un mauvais œil les Allemands prendre pied en Turquie […] »

C’est sans doute en pointant les buts de guerre des nations belligérantes que l’on comprend le mieux les antagonismes entre les impérialismes européens en 1914. Rappelons que plusieurs tentatives de médiation ont été faites, en particulier en 1916, et qu’elles ont achoppé sur ces antagonismes.

La France a communiqué ses objectifs à son allié russe : récupération de l’Alsace-Lorraine, annexion de la Sarre allemande (mines de charbon, sidérurgie) convoitée par les maîtres des forges, création d’un Etat tampon sur la rive gauche du Rhin pour soustraire la Ruhr industrielle au capitalisme allemand. De plus, la France convoite des colonies allemandes et attise depuis longtemps les revendications identitaires des « nationalités » de l’Empire austro-hongrois ; ce dernier choix implique un soutien indéfectible de la France au nationalisme serbe.

L’Allemagne a annexé l’Alsace et la Lorraine en 1871, source d’une guerre à venir contre la France (comme l’a bien analysé Marx immédiatement). Elle veut vassaliser la Belgique et mettre la main sur son Congo.

La Grande Bretagne pousse à l’éclatement de l’Empire ottoman en soutenant le nationalisme arabe et le sionisme. Pour se protéger, les Turcs s’allient à l’Autriche et à l’Allemagne.

Dans les Balkans, Serbie et Bulgarie sont en guerre en 1913, la première soutenue par la France, la Russie et la Grande Bretagne, la seconde par l’Autriche et l’Allemagne.

Même sur les océans, l’antagonisme est réel. La Grande Bretagne vit dans le mythe exalté de l’île indomptable protégée par une marine maîtresse du monde. Le développement rapide de la flotte et du commerce allemands l’inquiètent. Aussi, lorsque le président américain Wilson demande à Londres ses buts de guerre, le désarmement de la marine de guerre allemande constitue un objectif primordial.

On pourrait faire le même type de remarque sur l’antagonisme des belligérants en ce qui concerne le Détroit des Dardanelles, le Caucase ou l’or d’Afrique du Sud.

En février 1917, la victoire paraît se dessiner en faveur de la France et de ses alliés. Aristide Briand (chef du gouvernement) déclare que seuls les pays combattants et vainqueurs auront leur place à la table des négociations pour le nouveau partage du monde.

Les Etats-Unis pressent leurs préparatifs et entrent rapidement en guerre en avril 1917 ! Il n’est jamais trop tard pour bien faire !

En conclusion

« On croit mourir pour la patrie ; on meurt pour des industriels capitalistes» (Anatole France)

Dans sa thèse de doctorat, Félix Kreisler résume bien la question « S’il est vrai que l’empereur allemand, sous l’influence des généraux, des banquiers et des industriels qui voulaient conquérir de nouveaux marchés porte une responsabilité particulièrement grave, s’il est vrai que l’attitude arrogante de l’Autriche-Hongrie dans l’affaire de l’ultimatum à la Serbie a accéléré la déflagration, on ne peut en aucun cas dire que ces puissances centrales supportèrent à elles seules la responsabilité de la guerre… »