Depuis Da Vinci Code, Dan Brown règne en maitre sur le genre thriller médiéval avec grimoires cryptés, symboles, mystères … etc.
N’oublions pas que c’est Umberto Eco l’inventeur du genre roman ésotérique à rebondissements.
La différence entre les deux auteurs, c’est qu’Umberto Eco sait écrire et qu’il est un véritable professeur de sémiologie. Par exemple on sent sa présence de professeur érudit derrière les moines du Nom de la rose.
Dans Inferno , ce qu’il y a de plus infernal, c’est le style. Prenons par exemple la phrase d’ouverture que l’on retrouve aussi au dernier chapitre en conclusion : «Les endroits les plus sombres de l’enfer sont réservés aux indécis qui restent neutres en temps de crise morale.»
Quelqu’un peut-il m’expliquer ce qu’est un «indécis qui reste neutre», sinon l’un des pires truismes de la littérature, une lapalissade, voire un pléonasme (ou s’agirait-il en réalité d’une mauvaise traduction de Dante)?
Résumons l’intrigue.
Une «ombre» se suicide. Le Pr Robert Langdon, héros du Da Vinci Code, se réveille dans un hôpital à Florence. Il ne sait pas ce qu’il fait là, il est amnésique. Après Florence, il nous emmène à Venise. Ensuite ce sera Istanbul, sur les traces d’un complot maléfique. Il court. On essaie de le flinguer. Il court toujours. Bien sûr une jolie blonde au QI exceptionnel le suit partout, ils courent ensemble. C’est exactement le même principe que Da Vinci Code en remplaçant la Joconde par Dante et la belle brune par une belle blonde. Le professeur doit sauver le monde ! Excusez du peu !
On visite donc Florence, (il a dû toucher un beau paquet de la part de la cité qui parait-il a des retombées touristiques extraordinaires). Après on visite Venise, idem, puis Istanbul. Si vous faites du tourisme emmenez le bouquin, ça vaut un guide touristique.
Qu’en penser ?
Avec le temps et l’expérience, Dan Brown, a appris qu’écrire « iPhone et iPad » dans son roman lui permettait de gagner encore un peu plus d’argent. Il a appris aussi que les choses savantes c’était bien pour en mettre plein la vue, mais qu’il ne fallait pas qu’elles deviennent trop compliquées, pour ne pas décourager certains lecteurs potentiels dont les connaissances seraient plus limitées. Et surtout, il a appris qu’il était bien plus pratique d’anticiper l’adaptation cinématographique du roman pour ne pas avoir à le retravailler en profondeur le jour venu (qui ne tardera pas, sortie prévue en 2015).
Inferno est donc écrit dans une langue très simple (plus facile à traduire en une multitude de langues), sous forme de chapitres courts et faciles à lire, et tous les mots compliqués y sont expliqués en termes intelligibles pour tous.
Il comporte pour plusieurs millions de dollars de scènes d’action prévues pour le cinéma.
Il triture le destin de l’humanité avec des thèmes sensibles, ambiguës mais, commerciaux (pandémie, surpopulation, éthique médicale, manipulation génétique … etc.
Le roman est traversé, bien sûr, par un inévitable amour impossible, et révèle des destinées extraordinaires.
Dan Brown est une formidable entreprise commerciale de plusieurs dizaines de personnes, il suffit de voir la liste des remerciements pour s’en convaincre. Est-ce encore lui qui écrit ses romans ou son équipe ?
Mais on ne peut pas vraiment en vouloir à l’auteur : il ne peut séduire 86 millions de lecteurs sans quelques sacrifices …