Source Roger Lenglet, 24 heures sous influences. Comment on nous tue jour après jour
© François Bourin Éditeur, avril 2013
Capitale européenne du lobbying, Bruxelles abrite quelque 20.000 «professionnels de l’influence». Travaillant pratiquement sans aucune transparence, la plupart d’entre eux hantent les couloirs du Parlement, de la Commission et du Conseil pour défendre les intérêts de leur principal client: l’industrie. Au péril de la santé des Européens, de l’environnement et de la démocratie.
La France compte aujourd’hui 7 429 agences de lobbying, soit environ 30 000 lobbyistes.
De tels chiffres donnent une idée de la fourmilière de professionnels de l’influence qui entourent les élus, les ministères français aussi bien que le Parlement européen et les commissions qui élaborent les directives européennes.
Pour autant, tous les lobbies n’exercent pas une influence comparable. Leur poids économique et leur capacité à pénétrer les institutions ne s’équivalent pas. Ceux qui sont placés au sommet de l’Olympe conditionnent les aspects les plus importants de notre quotidien. Ils occupent donc ici une place de choix.
Mais qu’est-ce, au juste, que le lobbying ?
Un des stratagèmes rhétoriques habituels consiste à dire qu’il ne s’agit que d’un moyen, utilisé à bon ou mauvais escient – il y aurait ainsi le méchant lobby des armes à feu et le gentil lobby des marchands de chausson…
Évitons les malentendus : le lobbying est l’utilisation de toutes les stratégies d’influence possibles pour favoriser les intérêts des acteurs économiques assez fortunés pour employer des lobbyistes. Telle est la définition bien sentie que les professionnels concèdent quand ils entrent dans la confidence.
Un lobby défend donc avant tout des intérêts économiques particuliers. Son objectif peut être de maintenir ou de développer un marché, par exemple celui de produits mis en cause pour leur toxicité, ou tout simplement de renforcer une position face à des concurrents. Les cibles sont en priorité les politiques et les hauts fonctionnaires. Mais en démocratie, l’opinion publique, les consommateurs et les milieux de la recherche sont aussi « travaillés », car ils permettent d’influencer le législateur, le gouvernement et les institutions inspirant des traités ou des directives.
Comment agissent-ils ?
Les principaux outils sont le regroupement en coalitions financières ou industrielles (groupes de pressions ou lobbies), la rhétorique, la production de normes, de lois et d’« études », la pub déguisée, le montage de fondations ou de think tanks (en français laboratoire d’idées !) …
Un vaste panel de procédés où les déclarations morales cachent souvent un monde où l’on s’autorise de nombreux coups bas. De sorte que les stratégies d’influence font aussi bien appel à des lobbyistes en col blanc qu’à des lobbyistes musclés (ce sont parfois les mêmes), dont les commanditaires prétendent ignorer les moyens qu’ils utilisent tout en leur imposant une obligation de résultat.
Sur le terrain, cela se traduit immanquablement par une activité qui verse aisément dans la corruption, l’intimidation, la manipulation éhontée et des opérations de séduction inavouables.
Les scandales sanitaires et alimentaires qui se succèdent depuis les années 1980, du sang contaminé à l’amiante en passant par la « vache folle », le cheval travesti en bœuf, OGM, et d’autres moins connus, présentent tous un point commun : ils ne sont pas le fruit du hasard mais d’une volonté délibérée de faire passer d’inavouables calculs avant le souci de la santé publique.
Les actions de lobbying sont devenues si incessantes qu’une encyclopédie serait nécessaire pour couvrir tous les champs d’intervention. Raison pour laquelle je m’attache en priorité aux façons dont le lobbying industriel joue avec notre santé et, in fine, nous tue.
Mais tout ceci est légal. Il y a des écoles de formation au lobbying ! Par exemple, vu sur Internet :
Avec remise officiel des diplômes de la nouvelle promotion à l’assemblée nationale !
Ping :Cabinet lobbying Lyon