L’Union européenne a autorisé vendredi l’importation et la commercialisation de 19 OGM
Et ce, deux jours après avoir proposé aux Etats membres une réforme leur permettant d’interdire leur utilisation sur leur territoire.
Parmi ces 19 OGM autorisés par l’Union Européenne, onze produits de la multinationale américaine Monsanto, soja, maïs, colza et coton, figurent au nombre des OGM autorisés, a précisé la Commission dans un communiqué. Les neuf autres sont des produits de la firme américaine Dupont et des groupes allemands Bayer et BASF.
Dix-sept de ces OGM sont destinés à l’alimentation animale et humaine, deux sont des fleurs coupées.
Pourquoi la Commission les autorise-t-elle maintenant?
Ces autorisations «étaient en suspens», car les Etats membres ne sont pas parvenus à constituer une majorité pour ou contre leur commercialisation. L’autorisation est immédiate et vaut pour dix ans !
Mais que faire si un pays ne veut pas de ces OGM? Pour rassurer les 19 Etats anti-OGM, la Commission vient de proposer, il y a tout juste deux jours, une réforme qui permettrait à la fois de rendre plus facile l’importation d’OGM au niveau européen tout en permettant aux Etats membres qui le souhaitent d’en interdire ou d’en restreindre l’utilisation sur leur propre territoire. Autrement dit, si les gouvernements européens approuvent cette réforme, chacun pourra ensuite faire ce que bon lui semble sur son territoire.
Selon un responsable européen impliqué dans le dossier, le président de la Commission «était obsédé par l’accumulation d’autorisations d’OGM bloquées». Jean-Claude Juncker a donc «fait sa proposition et a lancé les autorisations sans attendre que les Etats prennent position. Si sa proposition est rejetée, il aura beau jeu de dire qu’il a présenté une solution et que les Etats et le Parlement ne sont pas capables de s’entendre», explique ce responsable.
Les écolos dénoncent «un cadeau aux lobbies»
Greenpeace a accusé le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, «de ne pas avoir l’intention de rapprocher l’Europe des citoyens, comme il l’a promis, et d’agir en faveur des intérêts des Etats-Unis et de Monsanto».
Pour les Verts, cette proposition n’est qu’hypocrisie: même si chaque Etat membre a la liberté d’interdire les OGM sur son sol, ces derniers pourront facilement se retrouver dans nos assiettes, disent-ils en substance. «Dans une zone de libre circulation des marchandises, la possibilité laissée aux Etats d’interdire ensuite ces OGM sur leur territoire est un leurre», écrivent les deux porte-paroles d’EELV, Julien Bayou et Sandrine Rousseaux, dans un communiqué. «Les porcs et les jambons produits avec des aliments transgéniques en Pologne ou en Espagne se retrouveront sans aucune difficulté dans les rayons des grandes surfaces des autres pays. Il n’y aura en effet aucune possibilité de mettre en place des contrôles efficaces», estiment-ils.
Pour EELV, «l’acceptation d’un tel système par les dirigeants européens est non seulement un cadeau fait aux lobbies mais également une insulte faite aux consommateurs européens majoritairement opposés à la consommation d’OGM».
L’eurodéputé écologiste français José Bové s’est pour sa part déclaré «scandalisé» par cette décision et a appelé le Premier ministre français Manuel Valls à «se montrer très ferme en interdisant ces OGM en France».
Les américains en voulaient plus !
Pour des raisons complètement différentes, les Etats-Unis se sont opposés à aux nouvelles règles envisagées par l’UE. «Nous sommes satisfaits que la Commission agisse sur des demandes qui lui avaient été soumises il y a longtemps mais ce n’est pas un remède de proposer aux Etats membres de pouvoir interdire des produits qui ont été jugés sans risques par les propres scientifiques de l’Union européenne», a dit M. Mullaney. (Adjoint représentant américain au Commerce pour l’Europe et le Moyen-Orient)
Les entreprises transgéniques applaudissent
Les représentants du secteur ont en revanche salué une mesure très attendue. «Les éleveurs européens utilisent beaucoup les produits des cultures génétiquement modifiées pour l’alimentation de leur bétail et il est important de leur accorder la liberté du choix», a affirmé l’association européenne EuropaBio. «Il y a plus de 40 demandes d’OGM supplémentaires pour l’importation encore en suspens dans le système», a insisté l’association des producteurs de biotechnologies, qui représente notamment les intérêts de Monsanto et Bayer.
OGM: où en est-on ?
Cette décision porte à 75 le nombre des OGM pour l’alimentation animale et humaine autorisés à l’importation pour la commercialisation dans l’UE. Un seul OGM est actuellement autorisé pour la culture, le maïs MON810 de Monsanto. Le tourteau de soja est la principale source de protéines pour le bétail. L’UE en a importé 18,5 millions de tonnes en 2013, selon les données de la Commission. 90% des importations proviennent de quatre pays – Etats-Unis, Brésil, Argentine et Paraguay – et sont génétiquement modifiés.