Vive le libéralisme à l’anglaise ! A quand la France ?

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Dete etudiants
Photo BBC Radio 4

Source : Emmanuel Sanséau – bastamag

Pour lire l’article en totalité cliquer ici : Comment les étudiants anglais sombrent dans leurs dettes

À peine majeurs et déjà rançonnés.

Cibles des politiques d’austérité des conservateurs, les étudiants britanniques paient l’éducation supérieure publique « la plus chère du monde industrialisé ». De Londres à Newcastle, le prix maximal par année d’étude est devenu la norme : 9 000 livres, soit 12 300 euros. Ainsi les dettes amassées par les jeunes anglais comptent-elles désormais parmi les plus élevées au monde. Le Premier ministre David Cameron a créé une génération d’endettés à vie, et une bombe financière à retardement supplémentaire. [ … ]

Emprunts étudiants : l’équivalent du budget des retraites

[ … ]En France, à peine 7 % des jeunes s’endettent pour leurs études. Outre-Manche, près de 80 % des leurs camarades anglais ont recours aux prêts étudiants.

Cette année, la dette moyenne d’un nouveau diplômé, après trois ans à l’université, s’élève à 44 000 livres (63 000 euros), soit le prix d’une berline de luxe. L’Institut for Fiscal Studies prévoit même que la plupart des emprunteurs rembourseront encore à l’âge de 50 ans !

Les conservateurs ont créé une génération d’endettés à vie.

Avec 10 milliards de livres octroyés chaque année, l’accumulation des emprunts étudiants atteint des niveaux colossaux : le gouvernement prévoit que la dette en cours dépassera les 100 milliards de livres (138 milliards d’euros) d’ici 2018, soit l’équivalent du budget des retraites en 2014. Le budget des retraites s’est élevé à 103 milliards de livres pour l’année comptable 2013-2014.

Bombe financière à retardement

Le remboursement des prêts est effectué automatiquement par les employeurs dès que les étudiants, devenus salariés, gagnent 21 000 livres de salaire : à partir de ce niveau de revenus, une taxe de 9 % est prélevée et versée à la Compagnie des prêts étudiants (Student Loans Company) – l’entreprise publique qui gère tous les emprunts étudiants.

Ce prélèvement s’arrête au bout de 30 ans, même si l’emprunt n’a été que partiellement remboursé.

Ainsi, la comptabilité des conservateurs pourrait rapidement se transformer en bombe à retardement : 45 % des emprunts pourraient ne pas être remboursés en intégralité, selon les estimations.

Or d’après les calculs du ministère des Finances, si la proportion des emprunts non remboursés dépasse 48,6 %, le dispositif des conservateurs deviendra plus coûteux pour l’État britannique que le système des frais d’inscription – moins élevés – qu’il a remplacé.

« Ce n’est pas tellement surprenant, assure Hope Worsdale, membre de la Campagne nationale contre les frais et les coupes budgétaires (NCAFC, ce nouveau mode de financement n’est pas tant une tentative d’équilibrer les comptes de l’État, mais plutôt une attaque idéologique contre l’institution publique ! »

Spirale mortifère du surendettement

Si les emprunts représentent déjà une pression considérable pour les étudiants, les établissements financiers n’ont pas tardé à flairer la bonne affaire.

Et à proposer des « payday loans », des prêts de très court terme et facturés à des taux d’intérêt effarants. Ils sont vendus par des entreprises prédatrices, florissantes sur Internet, qui n’hésitent ni à envoyer de fausses lettres légales à des clients en difficulté de remboursement ni à tromper délibérément les personnes les plus vulnérables.

Cette année, on estime que 30 000 étudiants britanniques y ont eu recours. Avec PiggyBank par exemple, il est possible d’emprunter 300 livres pour rembourser… 582 livres au bout de six mois !!!

[ … ] En 2013, Kane Sparham-Price, un jeune homme surendetté et souffrant de troubles psychologiques, est retrouvé mort à son domicile d’Ashton-under-Lyne, dans la banlieue de Manchester. Quelques heures avant son suicide, Wonga, la plus grande entreprise de payday loans du pays, avait vidé la totalité de son compte bancaire en toute légalité. Après qu’une série de scandales a forcé Westminster à réglementer l’industrie financière, la Consumer Finance Association, qui représente ses intérêts, a courageusement alerté le gouvernement : voilà que les mesures qui les contraignent à moins escroquer leurs clients ne feraient que jeter ces derniers dans les bras de prêteurs illégaux.

Et en Amérique ?

Il est presque impossible d’expliquer à quel point les étudiants américains sont endettés. Aux États-Unis, la somme cumulée de tous les prêts étudiants à rembourser dépasse les 1 300 milliards de dollars; cette somme augmente de plus de 2 000 dollars par seconde. En moyenne, un emprunteur doit rembourser dans les 28 000 dollars. Mais beaucoup d’étudiants ont encore plus. Un nombre important de jeunes diplômés, coincés entre un boulot qui ne paie pas et une éducation incroyablement coûteuse, n’ont même pas de quoi payer leurs intérêts. Comment, de fait, pourraient-ils rembourser leur prêt – parfois même leurs prêts ?
Certains sont tellement désespérés qu’ils ont voulu oublier leur dette en partant du pays, loin des banques et des agences de recouvrement qui finiront nécessairement, un jour, par partir sur leurs traces.