Bachar al-Jaafari : La vérité exige que vous écoutiez les témoignages des Syriens sortis de l’enfer du terrorisme !

Partager


Si nous savons encore compter, la guerre « sur » la Syrie entre dans sa huitième année. Voici le dernier communiqué de la diplomatie française intitulé : Septième année de guerre en Syrie (15 mars 2018).

« Nous condamnons la poursuite des combats dans la Ghouta, menés en violation claire de la résolution 2401 du Conseil de sécurité, qui exige de toutes les parties au conflit et sur tout le territoire une cessation immédiate des hostilités, un accès humanitaire sûr, durable et sans entrave et des évacuations médicales qui assurent la sécurité des patients et de leur famille. Les civils et les infrastructures civiles continuent d’être délibérément visés au mépris du droit international humanitaire.
Ces combats marquent, dans l’effroi, le septième anniversaire de la révolution syrienne. Depuis 2011, la répression engagée par le régime a provoqué la mort de près d’un demi-million de personnes, poussé sur les voies de l’exil 5,4 millions de Syriens et entraîné des destructions majeures.
La France n’a cessé d’agir pour trouver une solution politique à la crise syrienne, sous l’égide des Nations unies, seule à même de mettre fin au conflit. Elle continue de travailler avec ses partenaires et au sein des enceintes internationales, en particulier les Nations unies, pour mettre fin aux souffrances du peuple syrien, faciliter son accès à l’aide humanitaire et créer l’environnement permettant la mise en place d’un processus politique crédible sous l’égide de l’ONU et conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité. » [*].

Des révolutionnaires ! Encore et toujours des révolutionnaires. À se demander qu’est-ce qui devrait susciter le plus notre « effroi » : la situation en Syrie ou ce que cachent les mensonges de nos dirigeants ? Et plus le temps passe, plus la Syrie saigne, plus son peuple résiste, plus son armée avance, plus ils mentent et plus le gouvernement français continue de travailler avec ses « partenaires » pour prolonger les souffrances du peuple syrien.

Voici la réponse du Dr Bachar al-Jaafari, délégué permanent de la Syrie auprès des Nations Unies, devant le Conseil de sécurité le lendemain de ce communiqué.

Monsieur le Président,

Le 12 mars courant, j’ai exposé aux membres du Conseil les dispositions prises par mon gouvernement pour mettre fin aux souffrances des civils, du fait des exactions des groupes terroristes armés, sur tout le territoire syrien. Je réaffirme aujourd’hui que nul n’est plus soucieux que le gouvernement syrien de la vie de ses citoyens et qu’il continue à mettre en œuvre toutes les mesures destinées à garantir leur paix et leur sécurité.

C’est dans le cadre de ces efforts que le gouvernement syrien a ouvert un nouveau passage sécurisé dans la Ghouta orientale au niveau du village de Hamouriya libéré des terroristes, hier, jeudi 15 mars, afin de faciliter la sortie des civils ayant servi de boucliers humains aux terroristes.

Un passage supplémentaire emprunté, pour la seule journée d’hier, par plus de 40000 civils venus se réfugier dans le giron de l’État syrien ; lequel, avec le concours du Croissant rouge syrien, les accueillis et leur a facilité l’accession en toute sécurité à des centres d’hébergement provisoires équipés de tout le nécessaire, non l’accession à des camps ou des tentes.

D’où trois passages ouverts aux civils par l’Armée syrienne avec la coopération du Centre de réconciliation russe. Ce sont les passages de Hamouriya, de Jisrine et d’Al-Wafidine.

Hier aussi, le gouvernement syrien a acheminé dans la Ghouta un convoi de 25 camions, transportant 340 tonnes de vivres et de matériel médical ; envois partagés par le Croissant rouge syrien, le Comité international de la Croix-Rouge et les Nations Unies. Il continuera à faciliter l’acheminement de ces convois à chaque fois que les conditions sécuritaires le permettront.

Face à ces mesures prises par le gouvernement syrien pour la protection de ses citoyens, les groupes terroristes armés obéissant aux instructions directes de certains gouvernements continuent de prendre les civils de la Ghouta orientale pour des boucliers humains et les empêchent d’emprunter les passages sécurisés en les ciblant de leurs balles et de leurs obus.

Mesdames et Messieurs,

Il est étrange de constater que devant ce fardeau pesant lourdement sur le gouvernement syrien, afin d’appliquer la Résolution 2401 (2018) et de répondre aux besoins des civils sortis de l’enfer du terrorisme sévissant dans la Ghouta orientale, ni les organismes des Nations Unies opérant à Damas et notamment l’OCHA, ni les États qui font mine de pleurer sur le sort de non concitoyens civils n’ont apporté la moindre contribution matérielle ou morale pour soulager les souffrances de dizaines de milliers d’entre eux, une fois qu’ils ont échappé aux griffes des terroristes : 100000 civils déracinés à Afrin avec environ 100000 autres civils sortis de la Ghouta orientale, et pas une seule main tendue de leur part !

Monsieur le Président,

Dans le cadre de leur exploitation permanente des procédures de travail du Conseil de sécurité, deux États Membres ont mené une campagne de désinformation contre le gouvernement syrien en convoquant une réunion informelle le 12 mars courant…À cet égard, j’aimerais rappeler que l’Organisation des Nations Unies est une organisation de gouvernements, non une scène d’exhibitions musculaires, et qu’offrir à des groupes terroristes, dont lesdits « casques blancs » affiliés au Front al-Nosra, l’occasion d’exploiter la tribune du Conseil de sécurité est une violation scandaleuse des résolutions de ce Conseil, notamment celles concernant la lutte contre le terrorisme.

Plus scandaleux encore, Mesdames et Messieurs, est le fait que l’une des agences onusiennes opérant à Damas a demandé une autorisation de sortie, de la Ghouta orientale, pour 76 éléments desdits « casques blancs ». Ils n’ont témoigné d’aucune empathie à l’égard des dizaines de milliers de civils, mais ont voulu faire sortir 76 terroristes du groupe des « casques blancs » !

Monsieur le Président,

Si le Conseil de sécurité tient vraiment à connaître la vérité sur ce qui se passe en Syrie, il doit inviter quelques-uns de nos citoyens rescapés de la ville de Raqqa, afin qu’ils vous parlent des scandales de cette « coalition hors-la-loi » tellement soucieuse de la vie des civils, de son incommensurable respect du droit international depuis qu’elle a rasé leur ville et commis les pires massacres contre les leurs, de la protection qu’elle a accordée à 4000 éléments de l’organisation terroriste Daech avant de faciliter leur sortie de la ville pour les réutiliser ailleurs. La ville de Raqqa devenue, pour nous, comparable à la ville de Dresde pour l’Allemagne !

Le Conseil doit aussi inviter quelques-uns des nôtres de la ville d’Afrin, afin qu’ils vous parlent de l’application idéale des dispositions du droit international humanitaire et de la résolution 2401 par les forces d’invasion turques, lesquelles commettent les plus horribles des massacres contre les habitants de leur ville et lesquelles ont poussé à l’exode des dizaines de milliers d’entre eux.

Le Conseil doit aussi inviter quelques terroristes étrangers, revenus dans leurs pays, à une audience publique ici-même, afin qu’ils vous expliquent l’implication de leurs gouvernements respectifs dans leur recrutement, leur formation, leur armement, leur financement et leur expédition en Syrie pour qu’ils massacrent le peuple syrien ; ceci, évidemment, après les avoir recyclés, renommés et modifiés génétiquement pour qu’ils mutent en « opposition syrienne modérée » [ou en « révolutionnaires » selon la diplomatie française ; NdT].

Le Conseil doit aussi inviter quelques-uns de nos citoyens qui ont réussi à sortir de la Ghouta orientale ces derniers jours, afin qu’ils vous parlent des pratiques terroristes de « Jaïch al-Islam », de « Faylak al-Rahmane » et de « Ahrar al-Cham » ; ceux-là même que les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne et leurs agents dans les Pays du Golfe tentent laborieusement de faire passer pour une « opposition syrienne modérée »… afin qu’ils vous parlent de la manière dont ces groupes tuent ceux qui tentent de sortir et confisquent l’aide humanitaire et médicale pour les leur vendre à des prix au-delà de leurs moyens.

Le Conseil doit aussi inviter certains de nos concitoyens des deux villes de Foua et de Kafraya, afin qu’ils vous parlent du siège étrangleur auquel ils sont soumis depuis des années par l’organisation terroriste du Front al-Nosra, avec le soutien direct de la Turquie et du Qatar. Mais il semble que les oreilles des théoriciens de l’humanitaire se sont bouchées et que leur langue s’est paralysée pour évoquer ces civils là.

Monsieur le Président,

Si les pays occidentaux, qui prétendent mensongèrement tenir à la vie des enfants du peuple syrien, avaient témoigné d’un millième du respect de la Fédération de Russie pour les dispositions du droit international, des buts et principes de la Charte, des résolutions du Conseil de sécurité, notamment ceux relatifs à la lutte antiterroriste, le terrorisme ne serait fondamentalement pas apparu en Syrie et dans d’autres pays et les civils ne souffriraient pas de ce qu’ils endurent aujourd’hui, ni dans la Ghouta orientale, ni à l’Est d’Alep, ni dans la vieille ville de Homs, ni à Raqqa, ni dans d’autres villes syriennes.

Les pays occidentaux ont exploité le terrorisme pour saper l’Irak, la Libye, le Yémen et, maintenant, leur investissement dans le terrorisme ayant échoué en Syrie, il semble que si les États souteneurs du terrorisme pouvaient choisir entre leurs monstres terroristes et l’État syrien, ils choisiraient les monstres !

Pour finir, Monsieur le Président,

Le gouvernement de mon pays réaffirme sa ferme position quant à la solution politique de la crise en Syrie, une solution fondée sur le dialogue entre Syriens, sous direction syrienne, sans ingérence étrangère et sans conditions préalables.

J’ai passé des centaines d’heures à négocier avec M. de Mistura autour de ces termes importants, retenus dans le texte de votre résolution 2254 (2015). Ici, je rappelle que le succès du processus politique et l’amélioration concrète de la situation humanitaire dépendront principalement de l’engagement ferme des acteurs internationaux et régionaux à combattre le terrorisme en Syrie, loin de toute politisation.

Merci Monsieur le Président

Dr Bachar al-Jaafari
Délégué permanent de la Syrie auprès des Nations Unies
Le 16 mars 2018

Source : The Syrian Mission to the United Nations
Introduction, transcription et traduction par Mouna Alno-Nakhal pour Mondialisation.ca
***
La source originale de cet article est The Syrian Mission to the United Nations
Copyright © Dr. Bachar al-Jaafari, The Syrian Mission to the United Nations, 2018